#051 Sandra DIMBOUR DIPPEL – De l’ascension d’une championne à la transmission de la passion du sport – s03e13

Saison III
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#051 Sandra DIMBOUR DIPPEL - De l'ascension d'une championne à la transmission de la passion du sport - s03e13
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👩‍🏫 La vie d’une athlète ne se limite pas à sa présence sur les terrains. Sandra Dimbour est l’incarnation vivante de cette maxime. Ancienne sportive de haut niveau, Sandra a su évoluer dans le monde du badminton avec grâce et détermination, avant de se tourner vers une carrière d’encadrement et d’administration, toujours dans l’ombre des performances sportives.

Née d’une fusion culturelle entre les Pays-Bas et la Martinique, Sandra a découvert très tôt que le sport était son moyen d’expression privilégié, sa timide nature trouvant refuge et épanouissement sur les cours de jeu. Ses talents multiples la mèneront vers le badminton où elle éclos rapidement, remportant match après match, gravissant les échelons nationaux puis internationaux et même de concourir à 3 Olympiades : Barcelone (1992), Atlanta (1996) et Sidney (2000). 🏆

Au-delà des compétitions et des victoires, c’est sa passion pour le badminton et pour le sport en général qui ressort dans le récit de sa carrière, soulignant l’importance de se faire plaisir avant tout. Son parcours est ponctué non seulement par le soutien inconditionnel de ses parents mais aussi par des structures telles que l’INSEP et divers organes fédéraux, éclairant le rôle crucial du financement et des aides dans la carrière d’une athlète.

À la fin de sa carrière sportive, Sandra, loin de s’éloigner des courts de badminton, choisit de transmettre son savoir et d’aider à l’éclosion des futures générations d’athlètes. Elle s’illustre par son savoir-faire en entraînement et par son expertise dans la coordination des programmes sportifs au sein du CREPS et assurera bientôt une nouvelle mission au ministère des Sports.

À l’aube des Jeux Olympiques de Paris 2024, Sandra s’apprête à apporter sa pierre à l’édifice du sport français, transmettant son éthique de travail, sa persévérance et son amour inaltérable pour le sport.

Pour la suivre, la contacter et la soutenir, RDV sur https://www.linkedin.com/in/sandra-dippel-dimbour-oly-0aabb058 .

En termes de palmarès, voici quelques infos :

  • 3 Olympiades
  • 4 Championnats du Monde en simple et/ou double
  • 4 Championnats d’Europe en simple et/ou double
  • 11 x Championne de France en simple et/ou double et plusieurs fois Vice-Championne

Dans cet épisode, vous pourrez découvrir (chapitres de l’épisode) :

1. Introduction et accueil de Sandra Dimbour

2. Retour sur le parcours de sportive de Sandra

3. L’importance du sport pour s’exprimer et gagner en confiance

4. Le début de carrière et les impacts de la sélection en équipe de France

5. Le rôle des parents et de la Fédération et le financement de la carrière

6. La fin de la carrière de sportive et la transition vers l’entraînement

7. Le rôle de l’entraîneur et la vision du coaching

8. Sandra après le sport: reconversion et engagement professionnel

9. La situation actuelle de Sandra et son futur au ministère des Sports

10. Les conseils pour les jeunes athlètes et le financement de leur carrière

Grâce à Autoscript, on vous propose même de revivre l’échange que j’ai pu avoir avec Sandra : 

Ermanno : Salut les sportifs, c’est Ermanno et je suis très heureux de vous recevoir pour un nouvel épisode du podcast Dans les Vestiaires. Et je suis très heureux de recevoir une invitée, ancienne sportive de haut niveau, qui malgré tout l’est toujours, sportive un jour, sportive toujours. C’est une femme qui jouait en sport individuel mais avec un volant et non pas une balle, comme on a pu recevoir Victor Crouin qui est dans le top 10 mondial du squash. Je suis très heureux de tendre le micro à Sandra DIMBOUR.

Ermanno : Bon, salut Sandra !

Sandra : Salut Ermanno !

Ermanno : Bon, enchanté de te recevoir. Tu vois, aujourd’hui c’est épique, c’est comme un départ d’une course ou le lancement d’une compétition qui ne veut pas démarrer, mais on va y arriver. Sandra, j’espère que tout va bien pour toi aujourd’hui.

Sandra : Tout va bien pour moi aujourd’hui, je suis en congé dans les Landes, il ne fait pas super beau mais il ne fait pas très froid, donc tout va bien.

Ermanno : Bon, écoute, on va revenir là-dessus : sur le en congé dans les Landes, mais avant tout, j’aimerais te demander la question principale de ce podcast, qui est Sandra Dimbour ?

Sandra : Je suis… Je suis donc née en 1970, d’une maman néerlandaise et d’un papa martiniquais, j’ai très très vite, au cours de ma vie, pratiqué du sport parce que c’était pour moi ma façon de m’exprimer, j’étais particulièrement timide quand j’étais jeune et la seule façon que j’avais de m’exprimer et d’être à l’aise, c’était sur un terrain de sport, et c’est vrai que c’était les cours d’EPS qui me plaisaient le plus quand j’allais en cours, très clairement.

Sandra : Et j’ai très rapidement pratiqué de l’athlétisme, du foot, en suivant mon père en particulier, et j’ai fait du tennis, enfin j’ai fait plein de sports, tout plein de sports, j’ai été pas mal guidée aussi par des profs d’EPS dans mon collège, avec qui on faisait pas mal de ronde, du cross, etc. Donc j’ai vraiment pratiqué un petit peu de tout, et je suis arrivée vers l’âge de 13-14 ans dans un gymnase ou un club à Aubonne, a ouvert, qui était à proximité de chez mes parents, dans le Val d’Oise, et j’ai commencé à taper dans le volant, et puis je me suis prise au jeu, parce que c’était un sport dans lequel on s’amuse très rapidement, qui est très ludique. Et puis j’ai gravi toutes les étapes, j’ai vite gagné des matchs, donc ça, ça m’a plutôt bien motivée, on va dire, et arrivé dans les compétitions, j’ai vite été repérée par les entraîneurs régionaux dans un premier temps, nationaux par la suite. Le repérage, il s’est fait dans la période où il y avait la candidature de Paris pour les Jeux de 92. On a perdu cette bataille-là, mais ça m’a permis d’aller sur les Jeux de Barcelone derrière, et j’ai passé des tests au sein de la fédération, j’ai vite été prise dans les équipes de France jeunes, puis ensuite dans les équipes de France seniors, dans les années 86, 88, 89, ça fait quelques temps maintenant. Et puis voilà, j’ai poursuivi par la suite, et je suis devenue sportive de haut niveau.

Ermanno : Bon, on va revenir un petit peu plus en détail sur tout ça. Il y a une chose qui m’a interpellé dès le début de ta présentation, c’est que tu nous as dit que tu étais plutôt timide, et le sport t’a permis de t’exprimer. On peut revenir là-dessus ? Comment est-ce que, justement, de timidité, on arrive à s’exprimer dans, à grâce, ou à travers le sport ?

Sandra : Déjà, on n’a pas forcément besoin de parler pour jouer au badminton, on va dire ça. Non, c’était des terrains dans lesquels j’avais confiance en moi, parce que je connaissais un petit peu mes capacités, même si j’étais jeune, je connaissais un petit peu mes capacités, puis je m’éclatais à jouer, en fait. C’était le jeu, c’est surtout le jeu, moi, qui me plaisait. J’ai vite pris confiance, parce que, que ce soit en athlétisme, au foot, ou quel que soit l’endroit, le type de terrain, je jouais plutôt pas trop mal. Enfin, en tout cas, j’avais l’impression de pas trop mal jouer, donc avoir confiance en soi permet de s’exprimer assez facilement derrière. Et puis, au fur et à mesure, j’ai rencontré du monde, dans les compétitions de badminton, dans les compétitions d’athlétisme, au foot, j’ai rencontré beaucoup de monde. On faisait pas mal de sorties, on faisait pas mal de déplacements, et ça m’a permis d’avoir des contacts et de m’exprimer, tout simplement, aussi bien sur le terrain qu’en dehors du terrain. Et ça m’a permis d’acquérir un certain nombre de compétences aussi, hein, à travers le sport, que j’avais du mal à toucher du doigt à travers l’école, on va dire.

Ermanno : Bon, on reviendra aussi sur ce point, l’école. Est-ce que tu penses que, comme tu nous l’as dit, les victoires qui sont très vite apparues t’ont permis aussi de gagner en confiance en toi, et peut-être, justement, de te permettre de t’exprimer mieux, d’être un peu moins timide, d’être un peu plus extravertie ?

Sandra : Clairement, clairement. Déjà, on prend confiance à chaque fois qu’on gagne un match, ou même déjà quand on gagne un point, puis ensuite un set, puis ensuite les matchs. Ça permet d’avoir confiance en soi. De vouloir y retourner. Et à partir du moment où on commence à avoir confiance quelque part, on est plutôt positif, constructif dans le dispositif, et ça permet de s’exprimer plus facilement. Et puis, voilà, comme je le disais tout à l’heure, d’acquérir un certain nombre de compétences dans le jeu, à travers le jeu, et qui m’ont construit, qui clairement m’ont construit.

Ermanno : Bon, on l’aura compris, donc, ta carrière de sportif de haut niveau a débuté quand ? Dans les années 83, 84, 85 ? Pour se terminer. Au tout début des années 2000 ?

Sandra : Je dirais plutôt 88, 89, c’est là que j’ai été listée pour les premières fois. Et puis jusqu’en 2002, j’ai été listée jusqu’en 2002, mais j’ai arrêté l’équipe de France juste après les Jeux Sydney.

Ermanno : Donc tu disais, tu as arrêté ta carrière de sportif de haut niveau, tu as quitté l’équipe de France juste après les Jeux de Sydney, c’est ça ?

Sandra : Oui, c’est ça. Après, j’ai continué à jouer un petit peu parce que je préparais le professionnel. J’étais encore à deux sports à l’époque, à ce moment-là. Mais j’ai arrêté l’équipe de France juste après les Jeux. J’ai joué avec mon club, principalement les interclubs. J’ai fait un dernier championnat de France. Et puis après, je suis passée de l’autre côté de la barrière.

Ermanno : Et cet autre côté de la barrière, est-ce que ça t’a amené, on reviendra beaucoup plus en détail là-dessus, mais là tout de suite à chaud, est-ce que ça t’a justement amené à repérer, découvrir, encadrer, porter vers le plus haut niveau, d’autres sportives ou d’autres sportifs ?

Sandra : Oui, parce que j’ai été, j’ai passé le professeur à deux sports et j’ai vite été affectée à un Pôle France aux Crêpes de Châtenay-Malabré. Donc, j’ai dû encadrer des jeunes. Puis ensuite, après trois, quatre ans d’expérience, on m’a fait confiance et on m’a permis d’aller sur l’équipe de France féminine, l’équipe de France senior féminine. Ce qui m’a permis de côtoyer les meilleures joueuses. Ce qui m’a permis de côtoyer les meilleures joueuses. Ce qui m’a permis de côtoyer les meilleures joueuses. Et de les accompagner le plus loin possible. Enfin, en allant jusqu’au Jeu de Pékin, par exemple, avec Ong Yan-Pi. Alors, ce n’est pas moi qui l’entraînait et qui la coachait, mais j’ai eu l’occasion de pouvoir la coacher quelques fois sur certains tournois. Donc, ça m’a permis d’accompagner tout un tas de jeunes derrière et de prendre conscience aussi d’un certain nombre de choses qu’on ne voit pas forcément quand on est athlète. Donc, déjà dans le jeu, de comprendre mieux certaines choses. Donc, déjà dans le jeu, de comprendre mieux certaines choses. Donc, déjà dans le jeu, de comprendre mieux certaines choses. Et finalement, j’ai beaucoup appris, mais quand on devient entraîneur, on passe de l’autre côté de la barre. Et finalement, j’ai beaucoup appris, mais quand on devient entraîneur, on passe de l’autre côté de la barre. Ce n’est plus tout à fait la même chose. Ce n’est plus la même chose. On n’est plus sur soi, on est sur s’occuper des autres. Et là, ce n’est pas la même chose. Il faut apprendre à connaître les gens. Il faut apprendre à connaître leur façon de jouer, leur façon d’appliquer un certain nombre de consignes. C’est un autre métier. C’est une autre vie.

Ermanno : C’est intéressant ce que tu dis. Et je me pose la question, du coup, est-ce que pour être un très bon sportif de haut niveau ou une très bonne sportive de haut niveau, il ne faudrait pas aussi, dans le cadre du début de sa carrière, commencer à coacher, commencer à entraîner ? Alors après, le problème, c’est qu’une carrière de sportive ou de sportive de haut niveau, c’est déjà très, très, très chargé. Il faut s’entraîner. Il faut récupérer. Il faut aller à la recherche de partenaires slash de sponsors. Il faut faire les stages d’entraînement avec les équipes de France, etc. Donc, ça rajouterait une brique de plus. Mais est-ce que tu ne crois pas que le sport de haut niveau, c’est déjà très, très, très chargé ? Justement, une fois qu’on a déjà été listé une fois ou deux sur les listes ministérielles de sport de haut niveau, on pourrait aussi, au-delà de la simple envie de transmettre, mais avoir cette expérience que d’être entraîneur, alors que ce soit de niveau débutant ou de jeune jusqu’à être assistant entraîneur du plus haut niveau pour comprendre aussi comment est-ce que ça fonctionne de l’autre côté de la barrière ?

Sandra : Je pense que ça dépend des sportifs. Il y a des sportifs pour qui ce serait bien, je pense. De prendre conscience d’un certain nombre de choses, de voir les choses un petit peu différemment, de comprendre qu’on n’entraîne pas une personne comme les différentes personnes. D’autres ont besoin de vraiment se recentrer sur eux et je ne suis pas sûre qu’ils soient très à l’aise avec l’entraînement. Moi, je ne suis pas sûre que j’aurais été très à l’aise au départ à entraîner, même si je me suis rendu compte après, quand j’accompagnais les jeunes joueurs que j’avais sur le Crêpes, au Pôle France, qu’il y a un certain nombre de choses qui m’auraient peut-être servi à ce moment-là. Mais si j’avais fait ce parcours, je ne sais pas. Mais je pense que ça dépend des sportifs. Il y a des sportifs qui seraient capables de le faire, d’autres qui seraient moins capables de le faire, qui auraient d’autres compétences développées. Je ne pense pas qu’on puisse généraliser ce genre de choses-là. On n’entraîne pas tous les sportifs de la même façon. Je pense que c’est la même chose sur la carrière d’un sportif. Je pense que c’est la même chose sur la carrière d’un sportif. On évolue chacun à sa façon et à son rythme.

Ermanno : On évolue chacun à sa façon et à son rythme. Peut-être qu’on peut rester un petit peu sur toi justement et sur ce début de carrière sportive de haut niveau listé dès les années 87-88. Quand je te disais un petit peu plus tôt, 83-84, c’est vraiment le moment où tu commences à débuter le badminton, à être performante, à être repérée. Ça voulait dire quoi à ce moment-là, être sportive quasiment de haut niveau en badminton ? Ça voulait dire quoi à ce moment-là, être sportive quasiment de haut niveau en badminton ? C’est-à-dire sur une femme dans un sport qui, le badminton, est connu du plus grand nombre. Mais ce n’est pas le foot, ce n’est pas le tennis, ce n’est pas le golf, ce n’est pas le basket, ce n’est pas encore le handball non plus. Au milieu des années 80, qu’est-ce que ça voulait dire pour toi en tant que sportive et en tant que femme ?

Sandra : Au milieu des années 80, quand j’ai commencé, franchement, je n’avais pas du tout l’objectif de devenir sportive de haut niveau. Moi, ce que je voulais, c’était jouer au badminton. Jouer, être sur un terrain, courir, me dépenser et puis m’éclater. Donc, je n’étais pas du tout dans cette optique-là. Les choses sont venues un petit peu dans ma tête de manière très naïve, de manière très progressive, à tel point que même sur la qualification des Jeux de Barcelone, moi, je n’avais pas en tête d’aller sur les Jeux de Barcelone. Je savais qu’il y avait le badminton, je savais qu’il y avait possibilité de se qualifier, mais, objectivement, j’y allais. C’était mes premières années en équipe de France, quasiment. Ça faisait 3-4 ans que j’étais en équipe de France senior, mais je venais tout juste de devenir en numéro 1 française à ce moment-là. Je n’avais même pas regardé les critères de qualification pour les Jeux de Barcelone. Donc, c’est arrivé un peu comme ça.

Sandra : Après, je m’éclatais, je jouais. Ce que je voulais, c’était être sur un terrain. On avait la chance de pouvoir parcourir l’Europe et le monde parce qu’on passait notre temps aussi un petit peu en Asie. Je profitais bien de tout ça et puis je m’éclatais, tout simplement. Je n’avais pas forcément d’idées par rapport à la sportive de haut niveau, par rapport à le fait que je sois une femme dans un sport qui était assez confidentiel à l’époque, qui était peu représenté. Aujourd’hui, c’est très représenté dans le monde scolaire, mais c’est vrai que ce n’est pas du tout le foot ni quoi que ce soit. On ne gagnait pas très peu d’argent. Les seules aides qu’on avait, c’était les aides personnalisées. Et puis après, c’est mes parents qui m’ont beaucoup porté, très clairement. Moi, je m’éclatais. Ça m’a permis de m’exprimer, de grandir, de progresser. Je m’éclatais. Je jouais au badminton, c’était mon kiff. On va dire ça comme ça, comme disent certains jeunes.

Ermanno : Voilà. Le sport dans son plus bel apparat, plus ou moins ce que moi je trouve comme étant le plus beau. C’est-à-dire, ton objectif, ce n’était pas d’être championne du monde, championne olympique, sportive de haut niveau en badminton. Ton objectif, c’était de jouer et de t’éclater. Et c’est comme ça que tu as progressé. Alors, il y en a qui ont les dents longues et puis qui, dès le début, dès le plus jeune âge, ont envie de se retrouver tout en haut. Mais c’est quand même moins grandiose, moins sain, peut-être, quelque part, que la personne qui veut juste pratiquer son sport pour s’éclater, pour s’amuser. Pour le plaisir. Et qui, forcément, va se mettre à un moment à le transmettre aussi. Pour rebondir un peu sur la question de tout à l’heure et du coaching. Et puis, même les années qui ont suivi après pour toi. Oui.

Sandra : Clairement, on peut dire que le sport m’a construit. Parce que je suis toujours aujourd’hui dans le monde du sport. Je travaille toujours dans le monde du sport. Et c’est un peu ma famille. Donc, j’ai trouvé une famille, en fait. Voilà. Après, c’est vrai que moi, le badminton, à l’époque où j’ai commencé. C’était… Il faut savoir que la Fédération française de badminton, elle est née en 1979, si je me souviens bien. Donc, c’était extrêmement jeune. Les équipes de France, on commençait à peine à structurer les choses. On avait un DTN depuis peut-être un ou deux ans quand j’ai commencé, maximum. C’était vraiment peu structuré. Il n’y avait rien du tout quand j’ai commencé. Moi, j’ai vraiment profité de toute la structuration du badminton. C’est-à-dire que… Quand je suis arrivée, il n’y avait pas l’INSEP. Je suis arrivée, ils ont ouvert un pôle à l’INSEP. J’ai bénéficié d’entraîneurs étrangers qui avaient des expériences incroyables. Un entraîneur suédois, un entraîneur danois, puis un entraîneur anglais par la suite. Qui ont formé et qui ont construit et structuré le badminton en France. Qui ont formé les entraîneurs qui y sont passés dernièrement. Et qui sont aujourd’hui… Qui sont aujourd’hui sur les terrains. ‘est eux qui étaient à la base de tout ça. Moi, j’ai vraiment bénéficié de tout ça. J’ai vraiment eu l’impression d’avoir un parcours… Il n’y a pas eu beaucoup de problèmes. Il y en a eu quelques-uns, mais il n’y a pas eu énormément de problèmes. Et j’ai vraiment eu l’impression d’avoir de la chance. Et de tomber toujours au bon moment, au bon endroit. C’était incroyable. J’ai trouvé ça assez incroyable.

Ermanno : Ce sujet de la chance, je l’avais abordé aussi avec Jimmy Ville. Cette fois champion du monde de boxe thaï. Qui dit qu’il a beaucoup de chance. Oui, mais pour moi, je ne suis pas certain. Je trouve que la chance, c’est une succession de situations dans lesquelles on se met. Qui nous emmène effectivement à voir, à s’estimer chanceux. Mais c’est quand même une succession d’actions que toi tu as menées. Qui t’ont permis d’arriver là. Tu t’es entraîné dur. Tu as progressé. Tu as gagné. Et puis effectivement, c’était le moment pour le badminton français. Tu as pu bénéficier de tout ce qui se mettait en place. Mais au-delà de la chance, c’est surtout toi qui a mis tout ça en place.

Sandra : Oui, je pense qu’il y avait un petit peu une concordance des temps. On va dire ça comme ça. C’est vrai que moi, je suis arrivé. J’ai commencé à jouer. Je m’éclatais. J’adorais ça. J’étais quasiment tous les jours sur un terrain de badminton. Mais c’était un plaisir d’être là. C’était mon choix d’être là. Je voulais être là. J’ai fait les choses. Il y a des gens qui parlent de sacrifice, etc. Moi, je ne suis pas du tout dans ces terrains. Je ferme là parce que pour moi, sacrifice, ce n’est pas forcément très positif. Je souhaitais être là. J’adorais ça. J’adorais faire des efforts. J’adorais m’entraîner. J’adorais partir en compétition. J’adorais gagner. Ça, c’est sûr. Je n’aimais pas perdre, comme beaucoup de monde. Mais c’est certain. Et puis, les choses se sont construites au fur et à mesure. Le badminton est rentré sur les jeux en 1992. Et ça, je pense, a ouvert beaucoup de portes. À la Fédération française de badminton. Moi, je suis arrivée à ce moment-là. Et c’est une concordance des temps. Alors, c’est sûr qu’il y a eu des opportunités. Je les ai saisies très clairement. Mais je pense que s’il n’y avait pas eu cette concordance des temps, peut-être que ça aurait été plus compliqué. Donc, je pense qu’il y a un mix des choses qui ont fait que j’ai eu l’impression de naviguer, pas tranquillement, mais de naviguer plutôt positivement et de manière constructive dans un dispositif qui m’a permis de m’exprimer et qui m’a permis de faire ce que j’ai pu faire dans le sport de haut niveau.

Ermanno : Pour revenir un peu sur ta carrière et sur ton palmarès, il y a eu trois Olympiades sur lesquelles tu as concouru. Il n’y a pas eu de titre olympique. Mais peut-être que tu vas pouvoir revenir avec nous sur le pourquoi, le comment. Il y a eu des titres en championnat de France. Il y a eu des titres en compétition internationale. Tu peux refaire un passage avec nous rapidement sur ton palmarès pendant toutes ces années de pratique ?

Sandra : Alors, j’ai 16 titres de championne de France en simple, en double. Il y a plusieurs disciplines en badminton. Il y a cinq disciplines, simple, double et double mixte. Il y a simple homme, simple dame. Moi, j’ai participé au simple dame. Double dame et double mixte. Donc, j’ai eu des titres dans les trois disciplines. Donc, tu as tout ça entre 88 et 2000. Voilà. Ensuite, j’ai remporté quelques tournois. Tournois internationaux comme les internationaux d’Australie, internationaux de Slovénie, internationaux de Maurice. J’ai eu la chance d’aller à l’île Maurice. C’était plutôt sympa. En plus du fait de gagner là-bas. Mon meilleur classement mondial, c’était 19. 19e mondial. J’étais dans le top 20 quelques temps. Et puis, j’ai gagné deux ou trois fois le circuit européen, si je me souviens bien. Parce qu’il y avait un circuit européen. À chaque fois qu’on gagnait, on marquait des points à la fin de l’année. On avait un classement et j’ai gagné ce circuit-là. Ça, c’est mon palmarès, mon petit palmarès en badminton.

Ermanno : Petit, petit. Il y en a beaucoup qui rêveraient d’avoir un petit palmarès comme ça, que ce soit en badminton ou dans d’autres disciplines. Oui.

Sandra : Il y en a qui font beaucoup mieux que moi. Très clairement. Mais c’est vrai que je me suis éclatée. Ça, c’est clair.

Ermanno : Pour rentrer, vraiment mettre les pieds dans le plat de l’essence même de ce podcast, qui est de revenir sur le financement des carrières des sportives et sportifs, de haut niveau, tu disais tout à l’heure au hasard d’une des réponses qu’à cette époque-là, tout se structurait, mais le badminton n’était pas un sport très connu, très pratiqué en France et on ne vivait pas forcément très bien du badminton. Comment est-ce que toi, tu vivais ? Comment est-ce que tu organisais ta carrière ? Comment est-ce que tu mettais du beurre dans les épinards ? Si déjà, tu arrivais à payer les épinards.

Sandra : Oui. Moi, j’ai été beaucoup aidée par mes parents qui m’ont poussée vers le sport parce qu’ils ont bien vu que c’était… C’était là que j’étais le plus à l’aise. Ils ont financé une bonne partie de ma carrière, très clairement. Après, la Fédération française… Moi, j’étais numéro un française entre 90 et 2000. Donc, la Fédération, elle a aussi un petit peu financé. On avait des aides personnalisées qui n’étaient pas forcément énormes, mais qui permettaient de vivre. Et tous les tournois étaient pour… Tous les tournois internationaux, quand on partait avec les équipes de France, tout était financé par la Fédération à l’époque. Donc, je m’en suis plutôt bien sortie. J’ai pu aller faire quelques stages aussi au Danemark, en Asie, etc. Et tout ça a été financé par la Fédération. Comme j’étais numéro un française, je pense que c’était…

Sandra : Comme je disais, quand les planètes sont alignées, ça permet d’avancer. Je sais qu’aujourd’hui, c’est un petit peu plus compliqué pour les joueurs, même s’ils peuvent, sur le circuit, eux, gagner beaucoup plus que ce qu’on gagnait, nous, à l’époque. Parce que moi, je n’étais pas professionnelle. J’étais joueuse de badminton, mais à côté, je faisais soit des études, soit je travaillais. Tout ça, ça m’a permis de financer et de faire ce que je souhaitais. Très clairement. Mais les parents, c’est important. La Fédération a beaucoup aidé, très clairement, à l’époque, dans la structuration et le fait qu’on soit devenu olympique a apporté un petit peu d’argent pour les équipes de France et pour les meilleurs joueurs français. Et ça m’a permis de faire tout ce que j’ai pu. Après, je n’ai pas beaucoup économisé, on va dire, pendant cette période-là. Mais voilà, j’assume, il n’y a pas de souci. Derrière, ça m’a permis de passer le professeurat de sport. Aujourd’hui, je suis prof de sport. J’ai travaillé au Crêpes et à la Fédération. Et aujourd’hui, ça me permet de vivre et d’économiser. Mais ce n’était pas… Je n’ai pas connu de période très compliquée financièrement.

Ermanno : Sportif de niveau de 88 à 2000, tu as arrêté plus ou moins ta carrière à 30 ans. Tu me disais que tes parents ont beaucoup aidé. À côté de ça, soit tu faisais des études, soit tu travaillais. Si je ne m’abuse, en France, jusqu’en 2012, les années de pratique du sport au plus haut niveau ne sont pas reconnues pour le calcul de la retraite. Ou du moins, c’est encore un petit peu en discussion. Donc toi, finalement, toutes ces périodes, où tu ne travaillais pas jusqu’à tes 30 ans, jusqu’à la fin de ton statut de sportif de niveau, tout ça, c’est des années perdues pour ta retraite ou il y a des moyens de récupérer un peu ?

Sandra : Je pense que si je mets un petit peu de sous, que je paye mes trimestres, je pourrais rattraper certaines choses. C’est clair que je ne pense pas que j’aurai des trimestres suffisants à la fin de ma carrière. Ça, c’est clair. Mais au moins, il y a des périodes où j’ai quand même touché pas mal d’aides personnalisées et des primes à la performance. Qui m’ont permis de cotiser à ce moment-là. Parce que tout ce qui est retraite, c’est vrai qu’avant 2012, ce n’était pas forcément reconnu. Du coup, les années de sportif de niveau ne sont pas reconnues. Mais à partir du moment où on cotise, mon quotidien, même pour ceux qui sont après 2012, il faut qu’ils fassent attention parce qu’à partir du moment où ils cotisent, en touchant des aides perso ou en étant payés, ces données-là ne sont pas reconnues comme étant sportifs de niveau. C’est un peu complexe comme montage.

Sandra : ‘est sûr que je n’aurai pas ma retraite. Mais je pense qu’on ne sera pas beaucoup à avoir notre retraite à peu plein à cette époque-là. Je compte sur d’autres choses pour pouvoir payer ma retraite. Clairement.

Ermanno : C’est clair. On n’est pas tous des basketteurs ou des footballeurs. Je peux te laisser relancer parce que le son à nouveau se dégrade. Pas tellement pour moi, mais pour les auditeurs après.

Ermanno : Effectivement, quelques années, avec ce calcul de la retraite française qui est toujours un petit peu alambiqué, on cotise, mais on n’a pas forcément toutes les années, etc. Bref, maintenant, tu es, comme tu le disais, professeur de sport. Qu’est-ce qu’il y a, vers les années 2000, qui a déclenché chez toi cette envie ou ce besoin d’arrêter et ou de te reconvertir ?

Sandra : Le besoin d’arrêter, c’est que je sentais… Ça faisait quand même quelques années que je jouais à haut niveau et je commençais à prendre un petit peu moins de plaisir à l’entraînement. Donc, c’était… Ça me paraissait logique. Et puis, je m’étais dit, à partir de 30 ans, il faut quand même que je commence à me mettre à travailler aussi un petit peu quand même, même si j’avais déjà travaillé un petit peu avant. Mais voilà. Après, sur le choix de la reconversion, moi, tout au long de ma carrière, j’ai tout fait pour ne pas faire des études dans le sport parce que j’avais besoin, dans le cadre de mon activité sportive, de pouvoir m’éloigner de cette activité sportive et de faire autre chose que du sport pour m’aérer un petit peu la tête et pour éviter d’être… Comment dire ? De saturer. Parce que si je passais mon temps à faire du badminton, tout le temps, tout le temps, tout le temps du badminton, j’ai vite vu que ça ne fonctionnait pas et que je n’étais pas bien. Donc, j’ai fait des études plutôt journalisme, communication. J’ai travaillé pendant 2-3 ans en tant qu’attachée de presse à la Fédération. Et puis, après, j’ai quand même… Surtout l’année avant les Jeux de Sydney, j’ai pas mal cogité sur ce que je souhaitais faire et je ne me voyais pas ailleurs que dans le monde du sport, très clairement. Donc, j’ai fait le choix de rentrer au professeurat de sport haut niveau, qui est une formation qui nous forme et qui nous prépare au concours de professeurat de sport avec des places qui sont réservées aux sportifs de haut niveau. Alors, moi, je n’ai pas bénéficié de ces places-là parce qu’en fait, au bout de la première année, j’ai passé le concours et je l’ai réussi. Donc, je suis rentrée par la voie du professeur de sport en externe. Et puis, j’ai commencé à travailler, tout simplement. Voilà, c’est un petit peu comme ça que j’ai construit ma fin de carrière.

Ermanno : Et comment ça se passe pour une ancienne sportive de haut niveau qui se met à travailler ? Alors, prof de sport, ça veut dire que tu n’étais pas non plus devenu un col blanc à passer 40 heures par semaine derrière un bureau, mais, du coup, tu étais quand même astreinte à certaines règles et peut-être un petit peu moins libre que quand tu construisais ton planning d’entraînement dans la semaine. Donc, comment ça se passait à ce moment-là ?

Sandra : Alors, comment ça se passait ? Déjà, il a fallu que je passe de l’autre côté de la barrière parce que même s’il y a eu lieu un an entre la fin de ma carrière en équipe de France et le moment où j’ai pris mes fonctions de prof de sport auprès de la Fédération française de badminton, je suis restée un petit peu dans le badminton pendant quelques temps, moi, ma difficulté, ça a été déjà de passer de l’autre côté de la barrière, c’est-à-dire de ne plus penser qu’à moi mais penser aux autres. Ça, c’est la première chose. Et puis, surtout, de me fixer des objectifs qui ne soient pas aussi parlants pour moi que quand on est sur un terrain de badminton où l’objectif, c’est d’aller gagner un match, c’est d’aller gagner un tournoi, c’est d’aller gagner un circuit, de jouer pour l’équipe de France et de faire gagner l’équipe de France. Ce n’est pas tout à fait la même chose et ça, c’est vrai qu’il y a eu des moments où ça a été un petit peu plus compliqué que d’autres, il a fallu aussi apprendre à travailler avec les autres, avec des collègues qui ne travaillaient pas tout à fait au même rythme que moi. Je ne dis pas que ce n’est pas bien, eux, ils ont de l’expérience, etc. C’est que quand on est athlète, on demande aux athlètes d’être réactifs, de changer les choses rapidement parce que si on ne change pas les choses rapidement, on n’avance pas, on ne progresse pas, donc on ne gagne pas. Dans le monde du travail, c’est intéressant. C’est un petit peu différent, donc il a fallu prendre un petit peu le rythme là-dessus. Je me suis pris quelques petites réflexions et quelques petits retours mais qui m’ont fait progresser, qui m’ont fait réfléchir à un certain nombre de choses et puis surtout qui m’ont appris à travailler avec les autres, très clairement. J’avais appris un petit peu à travailler avec les autres quand on est sur un terrain de badminton, quand j’étais joueuse, mais je jouais pour moi. Là, je ne travaillais pas pour moi, je travaille en partie pour moi parce que ça me fait progresser, que ça me fait avancer, mais je travaillais avec des collègues et je travaillais pour des joueurs, pour une fédération. Ça m’a beaucoup perturbée pendant quelques temps, mais ça m’a fait progresser, ça m’a permis de m’ouvrir un petit peu plus aux autres. On va dire ça comme ça.

Ermanno : De la fédé de badminton, tu es passée à d’autres activités, toujours dans le monde du sport. Tu as intégré le Crêpes d’Île-de-France où là, tu accompagnes, tu es accompagnée des sportives et des sportives de haut niveau. C’était quoi l’orientation ? C’était quoi l’orientation ? De ta mission cette fois-ci ?

Sandra : Sur le Crêpes d’Île-de-France, quand je suis arrivée, je suis arrivée en 2011.

Sandra : La première chose, c’était le suivi socio-professionnel et plus particulièrement le suivi scolaire des sportives parce que dans les Crêpes,

Sandra : les sportives qui sont là sont jeunes, c’est des jeunes qui sont en Pôle Espoir voire en Pôle France, qui rentrent un peu dans le dispositif de haut niveau, qui ne sont pas encore sportives de haut niveau pour certains. Et l’idée là, c’était de construire tout un dispositif qui leur permette de faire et leurs études, que ce soit collège ou lycée, voire université derrière, et de pratiquer leur discipline favorite. C’est assez rigolo parce que moi, je n’étais pas forcément super à l’aise avec l’école quand j’étais jeune. J’ai navigué, j’ai obtenu mon bac comme tout le monde, etc. Mais ce n’était pas ma tasse de thé et puis je me retrouve à faire du suivi scolaire et aller travailler avec des profs et des établissements scolaires pour améliorer l’activité des aménagements et de l’accompagnement des jeunes en Pôle. C’est un petit paradoxe un peu rigolo, mais j’ai beaucoup aimé ce travail là. Ça m’a permis de faire évoluer un petit peu le dispositif au CREPS jusqu’à justement cette année, à la rentrée de septembre, à y intégrer un établissement scolaire au sein du CREPS. Donc voilà. Donc il y a eu beaucoup d’étapes. Donc mon travail, c’était principalement ça. Sur les deux dernières années que j’ai eu au CREPS, j’étais responsable du département sport de haut niveau, donc je n’avais pas que la scolarité à mettre en place. C’était une partie de mon travail. L’autre partie de mon travail, c’était évidemment de mettre les entraîneurs et les sportifs dans des bonnes conditions pour pouvoir s’entraîner au sein de l’établissement.

Ermanno : Et donc là, ce n’était pas que sur le badminton, c’était tout sport confondu ?

Sandra : Tout sport confondu, oui. Il y a 18 pôles au CREPS qui sont sur deux sites. Il y a un site à Châtenay-Malabry et un site à Mer-sur-Marne. Et là, c’est 16 disciplines différentes. Donc ça va du tir à l’arc au handball féminin, au basket. Donc il y a de tout avec des cultures sportives très, très différentes. Et c’est super intéressant. C’est très enrichissant de voir tout ce petit monde. C’est à peu près 200 sportifs qui sont répartis sur les deux étapes. Il y en a plus sur Châtenay que sur Mer-sur-Marne, mais c’est un petit peu plus sympa.

Ermanno : Tout ça, ça m’inspire une nouvelle question. Comment est-ce que toi, qui as « grandi », qui as évolué toutes ces années dans le sport, en commençant en tant que sportif de haut niveau, puis entraîneur, puis après en intégrant le CREPS, comment est-ce que tu as vu évoluer aussi des générations de sportives et sportives de haut niveau ? J’imagine que les petits jeunes de 2023 sont plus les mêmes que les petits jeunes de 2001, 2002, 2003 que tu as commencé à suivre, à encadrer.

Sandra : Moi, je pense que ce ne sont pas du tout les mêmes profils. Déjà parce qu’on n’a pas les mêmes outils aujourd’hui. J’ai l’impression qu’à l’époque, on n’avait pas forcément le téléphone portable. Il existait, mais ce n’était pas tout à fait les mêmes. C’était le début un petit peu du SMS. On appuyait 15 fois sur les touches pour mettre une lettre. Ah oui, je me souviens.

Ermanno : Nos plus jeunes auditeurs ne voient peut-être pas de quoi on parle, mais on n’est pas sur le téléphone à tourner quand même. Mais c’est vrai qu’appuyer plusieurs fois sur une même touche pour avoir le premier, le deuxième ou le troisième caractère, c’est un bon souvenir, ça.

Sandra : Oui, c’était un bon souvenir, mais les gens se parlaient un petit peu encore à table. Là aujourd’hui, les jeunes, ils sont beaucoup sur leur téléphone portable. Ils ont des outils un petit peu différents, clairement. Ils ont d’autres atouts. Ils ont d’autres potentiels et d’autres forces qu’à l’époque,

Sandra : mais on leur donne beaucoup, je trouve. C’est ce que je pense. Peut-être parce que nous, on n’avait pas forcément tout et qu’aujourd’hui, on a la possibilité d’avoir beaucoup de choses et de leur offrir beaucoup de choses, mais je trouve qu’ils ne les gagnent pas beaucoup, pour certains en tout cas. Il y a un gros travail à faire en termes d’autonomie et de responsabilisation des jeunes et de leur famille aussi, parce que les parents sont parfois aussi très demandeurs et très vindicatifs sur un certain nombre de choses. Je n’ai pas l’impression d’avoir eu des parents comme ça et je n’ai pas l’impression qu’à l’époque, les parents étaient comme ça. C’est mon sentiment, mais c’est vrai que les parents sont très… certains sont très présents, d’autres ne sont pas du tout présents. Je pense que ça, ça n’a pas changé. Mais pour ceux qui sont présents, ils ont tendance à demander des choses qui sont parfois un peu surprenantes et surtout à mettre la responsabilité sur autre chose que sur eux et sur leurs enfants. Là, il y a un travail énorme à faire, je pense.

Ermanno : On en revient un petit peu aux questions de sociétés actuelles et à l’évolution de cette société et puis aussi du sujet de la société d’immédiateté dans laquelle on est de plus en plus plongé. Effectivement, il y a des gens qui ont du mal à comprendre et quand on commence à toucher un peu au sport de haut niveau, que tout n’arrive pas comme ça tout cru et que ça demande des années et des années et des années d’entraînement, de pratique, de compétition pour pouvoir arriver au plus haut niveau. Si on reprend l’exemple du sport, du foot en particulier, Kylian Mbappé n’est pas devenu Kylian Mbappé du jour au lendemain. Il y a eu beaucoup d’années d’entraînement avant.

Sandra : Très clairement. Et puis surtout, il est allé les gagner, ces galons. Les choses ne sont pas forcément arrivées comme ça. J’imagine qu’ils n’ont pas roulé sur l’or toute leur vie dans la famille Mbappé. C’est vrai que moi, je vois arriver des jeunes qui n’ont pas forcément le niveau parce que c’est vrai qu’en crêpes, on a 200 sportifs, mais les 200 n’iront pas tout là-haut. Il y en aura peut-être 2, 3 par génération qui iront. Et des parents qui parfois, quand ça ne marche pas, remettent en cause le système et oublient de regarder un petit peu ce qu’ils font et ce que font leurs enfants. Voilà. C’est un point de vue personnel.

Ermanno : Balayer devant sa porte avant de balayer devant la porte des autres. Tu parles du crêpes, tu as parlé aussi de l’INSEP alors pas quand l’INSEP a été créé mais plutôt quand le badminton est entré à l’INSEP. Quelle est la différence entre l’INSEP et les crêpes ?

Sandra : L’INSEP, c’est le bateau amiral. C’est là où normalement quasiment tous les meilleurs sportifs passent. C’est principalement fait pour des sportifs qui sont déjà à très haut niveau, mis à part dans certaines disciplines comme le basket par exemple ou le pôle France qui concerne plutôt des jeunes. Mais c’est le bateau amiral. Les crêpes sont plus positionnées au niveau régional. Ils ont des missions qui sont déterminées par le ministère des Sports mais ils sont gérés en tout cas concernant les murs et les structures. Pour le coup, c’est les régions aujourd’hui qui gèrent les crêpes.

Sandra : Les fédérations positionnent des pôles espoirs, des pôles France jeunes généralement. Quelques pôles France élites selon les régions et les particularités des disciplines en question. Mais en général, dans les crêpes, on a des jeunes qui sont en devenir. Certains sont déjà sportifs de haut niveau, sont déjà listés mais ils sont plus en devenir qu’à l’INSEP, là-haut, c’est le top niveau.

Ermanno : C’est bon à savoir parce que c’est vrai que c’est des termes qu’on utilise assez régulièrement, notamment dans le podcast.

Ermanno : Merci à toi, Sandra, d’avoir détaillé les définitions avec moi. On l’aura bien compris, ta carrière de sportive de haut niveau est un peu derrière. Maintenant, tu es dans une carrière de sportive reconvertie, toujours dans le sport et dans l’accompagnement, dans la prise en charge des jeunes en devenir qui peut-être un jour iront jusqu’à l’INSEP sans trahir de secret. Tu nous as dit que tu étais né en 70, donc on a une petite idée de ton âge. Tu te vois où ? Dans 5 ou 10 ans, toujours dans le sport, toujours dans ce domaine-là. Est-ce que tu ambitionnes une autre reconversion ou peut-être qu’à l’orée des Jeux Olympiques de Paris 2024, d’autres missions s’ouvrent à toi ?

Sandra : Ce n’est même pas à l’orée. Normalement, au mois de janvier, j’intègre le ministère. J’ai candidaté sur un poste au sein du bureau des fédérations. Ce sera un peu plus administratif, un peu moins sur le terrain, un peu plus législatif aussi. Un peu dans les textes pour voir autre chose parce que c’est vrai que je suis au Krebs depuis 2011. Mais dans la réalité, je travaille au Krebs depuis 2001 puisque le Pôle France était au Krebs. Même si je travaillais pour la fédération, j’étais les trois quarts du temps au Krebs. Il va falloir que je bouge un petit peu et que je me mette de nouveaux challenges pour évoluer et vivre d’autres choses voir d’autres personnes. Découvrir une administration parce que c’est vrai que quand on est prof de sport, on peut très bien travailler pour une fédération mais aussi dans des services départementaux, régionaux ou à la centrale. Et là, en l’occurrence, j’ai l’opportunité de travailler au bureau des fédérations à la direction des sports. Ça va me permettre de découvrir autre chose, un autre monde, une nouvelle façon de fonctionner. Certes plus administrative, certainement moins mobile, mais tout aussi intéressante, je pense. J’essaie de rapporter un petit peu mon expérience de terrain. Parce que c’est vrai que dans l’administration, ils sont parfois un petit peu loin du terrain même si les gens qui sont dans ce service-là les connaissent et ils connaissent assez bien le terrain.

Ermanno : C’est parfois le reproche qu’on peut faire à l’administration et qu’on parle de sport ou pas, c’est que ce sont souvent des décisions qui sont prises par des technocrates, donc des gens qui connaissent très bien la technique mais qui sont peut-être un peu moins proches du terrain. C’est aussi ce que tu vas pouvoir apporter ton expérience depuis toutes ces années en tant que sportif de haut niveau, en tant qu’entraîneur et en tant que chargé de faire évoluer ces jeunes sportifs.

Sandra : C’est ce que j’espère pouvoir leur apporter et puis moi je vais revoir un petit peu tous les textes et prendre une expérience un petit peu différente du sport.

Ermanno : Autre question sur la projection et celle que j’aime poser à mes invités pour terminer ces épisodes, si tu pouvais te revenir en arrière et parler avec la Sandra d’Imbourg de 87, 88, tu vois, juste au début où tu es listée, qu’est-ce que tu penses que la petite Sandra dirait à la grande Sandra de maintenant ?

Sandra : Continue à t’éclater,

Sandra : joue, amuse-toi, voilà, en gros c’était surtout ça parce que ça a été mon moteur et c’est ce qui m’a fait avancer.

Sandra : Continue à vivre les expériences les unes après les autres et puis éclate-toi tout simplement. C’est un peu ça, c’est vrai qu’il y a des moments où on perd ces petites choses-là qui sont importantes et qui nous font avancer, qui nous font vivre et apprécier ce qu’on a tout simplement. Je pense que j’irais vers ça de manière très naïve parce que j’étais très naïve à l’époque comme beaucoup d’enfants, il y a beaucoup de naïveté et cette naïveté m’a toujours permis d’avancer. Parfois on m’a rattrapée un petit peu par le call-back et on m’a dit regarde ça avant. Mais y aller en s’amusant, en s’éclatant, en prenant plaisir dans ce qu’on fait. J’ai la chance de travailler dans un monde qui n’est pas toujours facile et pas toujours plaisant mais dans un monde où les gens s’éclatent quand même, c’est quand même un endroit où on aide les gens à s’amuser, à prendre plaisir, à se construire, aussi bien physiquement que mentalement.

Sandra : pense que c’est ce que je me dirais, éclate-toi.

Ermanno : Pour reboucler sur la question principale du podcast, si des petits jeunes venaient te voir en te disant moi aussi j’aimerais bien devenir sportif de haut niveau, on va prendre le badminton par exemple, au hasard, qu’est-ce que tu pourrais leur donner comme conseil ? Pas forcément sportif, mais vraiment pour ce qui est du financement de leur carrière.

Sandra : Déjà, qu’ils sachent qu’il y a beaucoup de choses qui sont mises en place. Tout n’est pas rose, très clairement. Ils ne vont pas gagner de l’argent tout de suite. Ça c’est clair. Pour gagner de l’argent au badminton, il faut être en équipe de France voire même au-delà puisque c’est aujourd’hui des quarts de finale, demi-finale dans des gros tournois internationaux, donc on ne gagne pas d’argent comme ça. Mais il y a quand même beaucoup de possibilités pour pouvoir s’en sortir. La seule chose, c’est qu’il faut savoir taper aux bonnes portes. Il y a beaucoup d’interlocuteurs différents qui font que ce n’est pas forcément facile de s’y retrouver. Très clairement. Il faut savoir où aller, que ce soit

Sandra : le club, la commune, la région, le département, les services départementaux, les dragesses, tout ça c’est un monde qui est complètement inconnu de tous les jeunes et qui fait qu’ils sont parfois un petit peu perdus et se retrouvent parfois dans de grosses difficultés. Il faut savoir taper aux bonnes portes, il faut savoir aussi s’imposer parfois auprès de la fédération, auprès des différents services pour pouvoir aller chercher des financements. Aujourd’hui, il y a encore de nouveaux financements possibles avec les financements participatifs, etc. Il y a plein de choses qui se développent. Il faut taper à la bonne porte et trouver les personnes idoines qui permettront de constituer les dossiers et puis d’avancer.

Ermanno : Je pense que tu me vois venir, mais comment faire pour trouver ces personnes, pour trouver le chemin bien fléché pour suivre les panneaux ? Il y a beaucoup de possibilités, il y a de quoi se perdre, mais il y a aussi de quoi avancer, évoluer et réussir à construire cette carrière.

Sandra : Déjà, il y a les fédérations. Au sein des fédérations, il y a une direction technique nationale avec des personnes qui sont chargées du suivi socio-professionnel et qui sont normalement là pour accompagner les sportifs sur le plan des études et des financements.

Sandra : Après ça, il y a les maisons régionales de la performance qui ont été mises en place il y a deux ans, deux ans et demi. Au sein de ces maisons régionales de la performance, il y a également quelqu’un chargé du suivi socio-professionnel. Ces personnes-là travaillent en lien avec les fédérations. Là, il y a déjà des choses. Ensuite, il y a les régions. Sur la région Île-de-France, il y a pas mal de financements qui sont mis à disposition des sportifs. C’est pareil, il faut taper à la porte parce que c’est une des prérogatives des régions d’accompagner parfois le sport de haut niveau. C’est très politisé, c’est pas pareil dans toutes les régions. Mais si on prend la région Île-de-France, il y a de quoi faire sur l’accompagnement des sportifs. Et puis après, les communes, si elles le souhaitent, les clubs, les départements aident sur les transports par exemple ou ce genre de choses-là. Donc en fonction des demandes et des besoins, il faut taper aux différentes portes. Mais la première chose, c’est les fédérations.

Sandra : C’est-à-dire qu’un professionnel doit pouvoir orienter les sportifs dans la bonne direction. C’est normalement ce qui se passe.

Ermanno : C’est bien noté,

Ermanno : Google chargé de suivi socio-professionnel ou socio-éducatif des sportifs et sportives de haut niveau. Et puis si jamais on ne trouve pas, n’hésitez pas à nous contacter et nous, on posera gentiment la question à Sandra. En dehors de ça, Sandra, si on veut rester en contact avec toi, si on veut suivre ton actualité,

Ermanno : si on n’est pas à 400, si on a quelques petites questions, où est-ce qu’on peut te retrouver ?

Sandra : Moi, j’ai un compte LinkedIn. Déjà sur le plan professionnel, s’il y a des gens qui souhaitent me poser des questions, on peut me poser des questions sur ce compte-là. Après, je suis sur les réseaux, plus pour la photo, parce que j’y poste mes photos. Mais il y a toujours des messageries, donc il n’y a pas de problème, je peux répondre aux questions.

Ermanno : Merci beaucoup, Sandra. On te souhaite une bonne continuation. Cet épisode sera diffusé certainement début 2024, donc tu seras déjà en fonction au ministère des Sports, mais on te souhaite que tout se passe bien. D’ici là, chères auditrices, chers auditeurs, passez une bonne semaine et on se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode.

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